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Verdict TSL: Au-delà de la déception, une première judiciaire

Publié dans l'OLJ du 22 août 2020

Par Karim el-Mufti, 


 La gestion de la tragédie du 4 août a confirmé à quel point le besoin de justice demeure criant au Liban. Dès les premiers jours, la cacophonie judiciaire s’est ainsi ajoutée à l’incurie et à la confusion des autorités, qui ont laissé la société civile en première ligne dans l’aide aux victimes et au déblaiement des dégâts. Tout cela traduit un vague sentiment de déjà-vu, dénotant le même état de désordre institutionnel que lors de l’attentat dans lequel a trouvé la mort l’ancien Premier ministre Rafic Hariri ainsi que 21 autres personnes, le 14 février 2005. 

C’est ce crime terroriste que le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) se chargeait de juger depuis le début, en 2014, du procès de cinq (puis quatre) accusés, tous affiliés au Hezbollah. C’est dire si ce verdict, rendu quinze ans après ce crime et deux semaines après le drame du 4 août, était attendu. Et les déceptions qu’a pu susciter sa teneur (une condamnation et trois acquittements) chez de nombreuses parties sont sans doute à la hauteur de cette attente. Avant même ce jugement, nombreux sont ceux qui voyaient déjà dans cette instance la manifestation d’une « justice sélective ». 

À la sortie de la guerre civile, une amnistie a effectivement blanchi les responsables des pires atrocités, tandis qu’étaient exclues de la clémence les attaques contre les figures politiques et religieuses. En 2005, une logique similaire semble l’emporter : les victimes lambda des multiples déchaînements de violence post-guerre ne pouvant espérer la même considération juridictionnelle que l’ancien Premier ministre assassiné. Modus operandi Et pourtant, il s’agit d’examiner les apports considérables rendus par les travaux du TSL. Notamment au regard de l’appréciation des éléments de preuve présentés. Comme le spécifie la version résumée du jugement : « La chambre de première instance ne détermine pas (…) si les accusés sont “coupables” ou “innocents”, mais (…), conformément aux principes du droit international des droits de l’homme, elle n’est tenue que de déterminer leur culpabilité au-delà de tout doute raisonnable » (§41). 

L’acquittement de trois des quatre accusés faute de preuves concluantes dénote l’attachement des magistrats à ces règles. En prononçant la culpabilité de Salim Ayache, les juges ont ainsi identifié nommément l’une des personnes impliquées dans le complot terroriste. Il fut également établi qu’il était un partisan du Hezbollah (§57) et que « la Syrie et le Hezbollah auraient pu avoir des raisons d’éliminer M. Hariri et certains de ses alliés politiques » (§57). Les juges ont estimé ne pas pouvoir « ignorer le contexte (politique et historique) de l’attaque comme étant un mobile possible » (§55), tout en reconnaissant que « les éléments de preuve ne permettent pas d’établir de manière affirmative qui les a menés à assassiner M. Hariri » (§502). 

Ainsi, si la cour n’a pas engagé la responsabilité du leadership du parti de Dieu dans l’affaire, c’est avant tout par manque de preuves, auquel l’altération de la scène du crime dès le soir même de l’attentat par les autorités libanaises (§85) n’est pas étrangère. En revanche, le jugement relève le très haut degré d’organisation et de discipline des personnes impliquées dans l’attentat, lequel « souligne l’implication (...) de personnes ayant un point commun tel que l’appartenance à une organisation (…) soudée dans laquelle des agents de confiance se voient déléguer des tâches particulièrement sensibles » (§497). Les enquêteurs, libanais comme internationaux, ont dû faire face à des obstacles monumentaux, dont le sacrifice du capitaine Wissam Eid assassiné en janvier 2008 – une affaire jamais élucidée par la justice libanaise – pour avoir brillamment mis au jour des indices cruciaux avec son étude des réseaux de télécommunications. 

Ces efforts ont permis de percer le modus operandi de l’attaque terroriste, ce qui constitue en soi une issue spectaculaire, et désormais connue au regard de tous. Selon le jugement, « dix individus ou plus étaient impliqués dans le complot criminel » (§475), sachant qu’au moins 63 personnes étaient impliquées d’une manière ou d’une autre. Ils établissaient le contact au moyen de mobiles aux lignes prépayées, liées à de fausses identités, et organisés en réseaux de communication voulus secrets. Ainsi, le principe de colocalisation des différents appareils mobiles a permis d’épingler Salim Ayache dans son « rôle central et leader dans l’exécution de l’attaque » (§553). Ce fil d’Ariane sans lequel « il n’y aurait aucune preuve le liant à l’explosion » (§543) constitue un précédent en matière de reconnaissance de cyberpreuves pour confondre les intentions criminelles d’un accusé. 

Or le simple fait de lever de nombreuses zones d’ombre sur une attaque terroriste d’une telle sophistication tout en aboutissant à une condamnation constitue, en matière d’assassinat politique, une première dans l’histoire du Liban. En sus, cette condamnation apporte un début de reconnaissance aux souffrances des victimes dont la chambre a rappelé la nécessité d’attribution de compensations. 

 Leçons

D’une certaine manière, ce jugement apporte donc aussi une pierre utile au puissant mouvement de redevabilité qui anime toutes les victimes au Liban, particulièrement depuis la catastrophe du port de Beyrouth. Il y va de l’intérêt national de sortir de la hiérarchisation des victimes pour construire les outils mettant fin à l’impunité. Ce premier verdict apporte également des leçons de poids sur le plan du contre-terrorisme, dans une région sclérosée par ce fléau. 

Le modus operandi révélé a mis en lumière des failles monumentales dans le dispositif sécuritaire libanais. Qu’il s’agisse des faits établis (la surveillance, les canaux de communication, les moyens financiers faramineux, etc.) ou non (par exemple l’acquisition des explosifs ou l’identité du kamikaze) par la chambre de première instance, les Libanais sont en droit de savoir si ces défaillances structurelles ont été résolues, les auteurs n’ayant jamais été inquiétés, ni même soupçonnés. 

Par ailleurs, le mandat du TSL inclut aussi trois autres cas appelés à être jugés, à savoir l’assassinat de Georges Haoui, le 21 juin 2005, et les tentatives d’assassinat contre Marwan Hamadé le 1er octobre 2004 et Élias Murr le 12 juillet 2005. Il n’est pas non plus exclu que le procureur fasse appel de l’acquittement des trois autres accusés de l’affaire Hariri, à condition toutefois de pouvoir entrer en possession d’éléments nouveaux et d’avoir l’opportunité de pouvoir remonter la piste des commanditaires, grands absents du premier procès. En attendant, il est de la responsabilité des autorités libanaises de tout mettre en œuvre pour arrêter Ayache. 

Sans véritable effort, les officiels libanais risquent de s’attirer des sanctions internationales, notamment américaines. Dans ce contexte politique et judiciaire, le Hezbollah se confronte à un casse-tête pour tenter de limiter l’impact de cette épée de Damoclès. Fils et héritier politique de l’ancien Premier ministre assassiné en 2005, Saad Hariri pourrait, lui, y voir une brèche lui permettant de remonter en selle après une série de déconvenues qui ont manqué de le propulser hors du jeu politique libanais.

Working conditions, minimum standards and employer-provided protections in Lebanon

Case study research into Lebanese and non-Lebanese informal workers in the food and beverage industry in central Bekaa, Minieh and Akkar

 

Author: Dr. Karim El Mufti 

31 August 2018

Summary:

Many studies have investigated the crisis in livelihood, a crucial factor for the well being and dignity of displaced and refugee populations, and the lack of legal protection to which Syrian workers are subjected, especially in light of Lebanon’s crisis response plan.

This research intends to shed light on another angle to this issue, by focusing on protection-related questions within the food and beverage (F&B) industry, an increasingly informal sector due to worsening socio-economic conditions. According to the International Labor Organization, informality in the labour market is defined, “among other things, by the absence of explicit and registered work contracts and/or the absence of social security coverage for workers on the job".

The geographic scope of this research is the Bekaa and Akkar, economically underdeveloped regions that host the two largest Syrian settlements in Lebanon at 35.7% and 25.8% respectively. The study examines the employer’s role in the protection of vulnerable workers, whether Lebanese or Syrian, and relies on data collected from a survey in those two areas.

The survey encompasses 200 interviews with employees within the F&B sector (102 from Akkar and 98 from the Bekaa) generating information on the respondents’ formal status, working conditions and potential grievances. The study also relies on focus groups with local business employers in both areas.

Full study available in pdf here

Not Without Dignity: Views of Syrian Refugees in Lebanon on Displacement, Conditions of Return, and Coexistence

A Study for the International Center for Transitional Justice:

Discussions about a future return of refugees and coexistence among groups currently at war in Syria must begin now, even in the face of ongoing violence and displacement. This report, based on interviews with refugees, makes it clear that the restoration of dignity will be important to creating the necessary conditions for return and peaceful coexistence — and building a stable post-war Syria one day.

Download the full report in English here.
Download the executive summary in Arabic here.

June 12th, 2017

Armed conflict in Syria has displaced millions of people inside and outside of the country. When a political settlement to the conflict is eventually reached, the process of refugees returning to Syria and rebuilding their lives, relationships, and communities will be long and complex. However, discussions with displaced persons about return and coexistence can begin now, even in the face of ongoing violence and displacement.

This research report is based on interviews with refugees living in Lebanon and representatives of local and international organizations in both Lebanon and Turkey working on issues related to Syrian displacement. The report provides an important window into the experiences of refugees in Lebanon as well as their concerns, expectations, and priorities regarding conditions of return and coexistence.
The research findings highlight the harms experienced by Syrian refugees at both the individual and collective levels, including the loss of loved ones, houses, property, and businesses in Syria and difficult economic situations and discrimination in Lebanon. Displacement has had devastating impacts on families and led to broad social fragmentation, including sectarian and political divisions and rifts between those who left Syria and those who remained. The effects of conflict and displacement will be generational, as refugee children have been traumatized by their exposure to violence and largely deprived of education.

The findings also capture common priorities among Syrian refugees in Lebanon for return. Most do want to return, not just to Syria but to the regions and communities where they previously lived. Common preconditions for return include safety and security; shelter, livelihoods, and the physical reconstruction of homes and infrastructure; compensation or restitution for the loss of property and housing; the provision of education for children and youth; psychosocial support; and family reunification.

One positive development among refugees in Lebanon is that many youth engaged with local and international civil society organizations have acquired new skills and an openness to people with different religious and political beliefs that one day may contribute to rebuilding relationships in Syria.

Views about the potential for coexistence and justice vary widely. Some refugees believe that Syrians will be ready to rebuild ties once the conflict ends, while others are less optimistic. Some believe that justice is necessary for return, while others think it unlikely to occur. The research makes it clear that the restoration of dignity will play an important role in establishing the necessary conditions for refugee return and coexistence.
While return will ultimately depend on a political resolution to the Syrian conflict, several steps can be taken now that are likely to have implications for return and coexistence in the future. These include:
  • Integrate the views of refugees into discussions and policies about conditions of return, as participatory processes are more likely to lead to context-specific interventions.
  • Support community-level interventions, like the provision of psychosocial support, that can be implemented now and may facilitate return and coexistence in the future.
  • Address sexual and gender-based violence, women’s exploitation, and child marriage by empowering women, educating young girls, and raising awareness of such abuses among families.
  • Provide educational support to minimize the risk of the next generation being characterized by missed schooling, trauma, and violence.
  • Integrate property and land restitution into discussions of displacement settlement processes in the interest of future social cohesion.
  • Promote interaction between different groups and communities to reduce and prevent further sectarian and political divisions.
  • Support further research on Syrian refugee experiences and views on return and coexistence in countries such as Turkey and Jordan as well as in Europe.